Traduction: Jean Emmanuel Nunes
Paris / France
Le sens du mot méchanceté est lié à la qualité de celui et de ce qui est mauvais, à une action néfaste, à l’iniquité et à la cruauté. Mais pourquoi certains sont-ils attirés par la méchanceté ? Cette question a toujours perturbé les penseurs des domaines les plus divers du savoir et de l'action humaines : philosophie, science, art, religion.
Historiquement, selon certains modèles de réflexion, les maux de l’humanité ne préoccupaient pas les penseurs, le mal apparaaissant circonscrit. Pour certains spécialistes de "l'holocauste", lors de la Seconde Guerre mondiale, le débat a été ravivé autour des limites de la barbarie et de la méchanceté humaine, envoyant dans l’univers intellectuel européen et mondial une vague de pessimisme et de scepticisme.
Hannah Arendt, une philosophe juive ayant étudié cette question du mal, écrivit son célèbre livre intitulé «Eichmann à Jérusalem», qui analysa le procès du bourreau nazi, initiateur de la mort de milliers de personnes. En prenant le «cas Eichmann» pour référence, l'auteur put établir que le mal pouvait devenir banal et se répandre comme une traînée de poudre au sein de la société, mais seulement superficiellement. Pour Arendt, les racines du mal ne sont pas définitivement enracinées dans le cœur de l'homme, parce qu'elles ne peuvent pas le pénétrer suffisamment en profondeur pour y établir son foyer, et peuvent donc en être éradiquées.
Pour beaucoup, le mal serait plus fort que le bien, et les mauvais esprits seraient capables de vaincre les bienfaiteurs spirituels, frustrant ainsi leurs desseins supérieurs. Que valent de telles assertions issues d’une tradition ancienne ? Elles sont insoutenables et fausses, et seraient même un non-sens. Admettre le triomphe du mal au détriment de l'humanité, ce serait comme nier au Seigneur de la vie ses attributs d'omniscience et de toute-puissance, sans lesquels il ne pourrait être le Seigneur de la vie.
Le mal n’est pas le fruit des Statuts du Tout-Puissant, comme le conçoivent certains imprudents, en particulier ceux qui sont loin de comprendre la Bonne Nouvelle. Le mal est transitoire, et n'a pas de racines. Pour le spiritisme, le mal est une création de l'homme lui-même, dont l'existence n’est que temporaire, transitoire, car la permanence du mal ne permettrait pas le progrès de la Vie.
Dans le chapitre traitant de l'échelle spirite, le Codificateur classa les esprits imparfaits dans le troisième ordre et traça leurs caractères généraux : « Ceux du dernier degré sont encore au bas de l'échelle : les Esprits imparfaits. Ils sont caractérisés par l'ignorance, le désir du mal et toutes les mauvaises passions qui retardent leur avancement » [1].
L'humanité a subi des transformations viscérales ces dernières années. L'influence du matérialisme sur ces problèmes croît considérablement, au même rythme que la vie sociale. Les valeurs morales se corrompent avec une rapidité étonnante. Jamais le monde n'a eu autant besoin des enseignements spirites qu'aujourd'hui. Nous vivons des moments où la révolte dans les cœurs s’intensifie sous l’effet d’idéologies en faillite, d’autant plus que les tempêtes technologiques poussent à l’intensification de la séparation et de l’isolement, conduisant à des niveaux de révoltes sociales inacceptables.
Bien sûr, on ne peut ignorer la lutte pour la subsistance. Il y a les maladies, les insatisfactions, les conflits émotionnels, les désillusions. Les imperfections propres à ceux avec qui nous vivons. Enfin, les diverses vicissitudes de l'existence.
De par ce véritable désordre, qui fait que l’on use et abuse du libre arbitre, chacun remporte des victoires ou subit des défaites amères, en fonction du degré d'expérience acquise. Certains rient aujourd'hui et pleureront demain, et d'autres qui se vantent maintenant seront humiliés plus tard.
Il faut interroger sa conscience, examiner ses actes quotidiens, identifier les manquements aux devoirs qui auraient dû être remplis ainsi que les motifs de ceux qui se plaignent de nos agissements. Chacun doit réexaminer périodiquement ses échecs et ses chutes sur le plan moral, réactivant sa mémoire pour se souvenir des nombreuses épines incrustées dans la «chair de l'esprit» [2], comme l'enseigne Paul de Tarse. Ces épines rappellent à chacun sa condition de malade en longue convalescence, et qui a besoin d’aide. Le mal n'est pas invincible, bien au contraire.
Nul ne saurait être exempt des conséquences des maux commis. Le mal qui naît en chaque personne, l’imprègne et fait temporairement partie de sa personnalité.
Paul de Tarse, dans son Epître aux Romains, commente les luttes qui doivent être menées pour combattre le mal présent en notre for intérieur, dans une phrase restée célèbre: « Je ne fais pas le bien que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas » [3]. Le mal dont parle Paul dans ses épîtres est le mal trivial qui subsiste en nous et qui se nourrit de notre volonté. Et, dans une certaine mesure, cela nous procure du plaisir, de par l’étourdissement de notre conscience.
Les ténèbres ne sont que l'absence de lumière. Ce n'est pas réel. Seul Dieu est vie ; seul le bien est un objectif de la vie. Pour pouvoir entrevoir un monde exempt d'angoisses et de problèmes sociaux, exempt des misères économiques et politiques, seul l'amour inconditionnel dispose des ressources à même de parvenir à la conciliation, au pardon, à la transformation morale, au progrès du bien, ce qui contribue à enrichir la sensibilité, à améliorer le caractère, à développer de nouvelles facultés, c'est-à-dire à faire que nos joies se développent et que notre bonheur augmente.
En somme, le mal découle du cœur humain et, la bataille du bien contre le mal (qui est l’objet d'innombrables livres et films) doit être avoir lieu avant tout dans le cœur de chacun.
Jorge HESSEN
Le 13 avril 2015
Source : A luz na mente, revista online
Traduction : J.E.
Sources :
[2] Seconde épître de Saint-Paul aux Corinthiens, 12:7
[3] Epître de Saint-Paul aux Romains, 7:19